En lisant le blogue de ma femme, je me suis dit qu’il serait peut-être temps pour moi aussi d’aborder un certain sujet difficile : le fait que je n’ai pas d’enfant et que j’en n’aurai peut-être jamais.
Au fil du temps, j’ai vécu toute cette affaire plus intérieurement. Ma femme, de par sa nature plus volubile que la mienne, a beaucoup verbalisé ses émotions par rapport à tout cela. Son approche était probablement la meilleure à bien y penser. De mon bord, j’ai beaucoup ruminé des sentiments divers, pas toujours très jolis.
Pendant tellement longtemps, je n’ai pas voulu d’enfant. Je craignais toujours l’idée de voir ma progéniture en face. Voir un enfant qui me ressemble vivre ce que j’ai vécu, voilà une idée qui ne me plaisant pas du tout. De plus, je ne me pensais pas tellement apte à devenir père. Je ne suis pas un leader, je ne voulais pas manquer mon coup.
Quand Chantal est entrée dans ma vie, elle a tôt fait de me parler de son désir d’adopter un enfant. C’était clair dans sa tête, elle ne voulait pas être enceinte. Je n’y voyais pas de problème et je n’en vois pas encore aujourd’hui. L’idée de l’adoption était donc semée dans mon esprit, il ne me restait qu’à me faire une idée plus finale sur le sujet. Un jour, il m’est apparu clair que je voulais être papa : je voulais donner le meilleur de moi-même, aux côtés de ma femme, pour élever un enfant dans l’amour.
J’ai annoncé ma décision à ma femme lors d’un souper au resto. Elle a été emballée et le projet d’adoption en Ukraine a pris son envol au cours des mois qui ont suivi. Ma femme a parlé de ce processus sur un autre blogue, donc je ne reviendrai pas sur le sujet.
Quand notre projet d’adoption en Ukraine est mort, nous l’avons pris très dur. Ma femme l’a vécu très extérieurement. Moi, c’était le contraire. Je n’ai rien dit. J’ai tenté d’être là pour ma femme, du mieux que j’ai pu. J’espère avoir été à la hauteur, et j’essaie encore de l’être. Ma femme est réellement ce que j’ai de plus précieux, et je partage sa peine à part entière. Cet ange d’Ukraine était notre rêve commun, ce sur quoi on avait mis toutes nos énergies.
Je l’ai vraiment vécu comme une grossesse qui se termine en fausse couche. Dans ces cas-là, on oublie souvent le papa. Bien souvent, celui-ci n’extériorise peut-être pas assez. C’était le cas avec moi. J’ai pleuré mon ange perdu en silence. Le soir, après que ma femme trouvait le sommeil, je me voyais souvent incapable de dormir, pris dans mes pensées. Les fins de semaine, j’en venais à m’engourdir avec la bouffe et l’alcool pour oublier tout cela. Je m’étais tellement dit que la paternité ferait de moi un meilleur homme. Ce serait terminé cette vie d’excès. Devant ce rêve brisé, c’est comme si je prenais ma revanche en fonçant à toute vitesse vers le pôle opposé à mes bonnes intentions.
Je n’en suis pas fier, ce n’est franchement pas la solution. Mais, à très court terme, l’ivresse engourdissait la douleur. Pourtant, ma vie était loin d’être vide. J’ai une femme qui m’aime et que j’aime plus que tout. J’ai des amis et une famille élargie qui sont là pour moi. Cela dit, cet ange envolé que je ne prendrais jamais dans mes bras ne sortait pas de ma tête et de mon cœur. Un vide avait été créé en moi, et je me demandais comment le combler.
Il y avait un autre sentiment que je ressentais, et je me sentais coupable de me sentir ainsi. Plusieurs personnes dans mon entourage devenaient parents. Malgré le fait que j’étais content pour eux, j’étais aussi envieux. Je trouve ça tellement laid comme sentiment, mais je ne pouvais pas le retenir pleinement. Je les jalousais en silence.
Maintenant, il y a le dossier d’adoption au Nouveau-Brunswick, mais il est fort probable que cela ne mènera à rien, compte tenu des circonstances. Suis-je en paix avec tout cela? Non. Tout comme ma femme, plein de questions et de commentaires d’autrui me ramènent à ces pensées qui me font mal. J’essaie de mon mieux de combler ce vide en moi, de la façon la plus constructive possible. J’ai ma femme à mes côtés, l’amour de ma vie. Cet amour est fort et solide. On s’épaule l’un et l’autre de notre mieux dans nos combats respectifs et commun. On gâte les enfants des autres. Ce n’est pas la même chose, mais la présence de n’importe quel enfant enrichit une vie. Pour le reste, j’essaie de faire mon deuil. Qui vivra verra…
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4 commentaires:
Je comprends.. c'est dur..
Merci Nancy pour la compréhension. Je sais que tu comprends. C'est définitivement difficile pour un couple...
Marc, tu n'as pas idée comme ton blog vient me chercher de plusieurs façon...
Ce que vous avez vécu et vivez encore me touche énormément. N'abandonnez surtout pas votre amour pour les enfants.
D'un autre côté, je ne peux m'empêcher de me trouver un tantinet hypocrite, puisqu'étant moi-même père depuis peu, mais je t'assure, je comprends. Peut-être pas exactement au complet, peut-être que je ne peux pas partager toute l'intensité de votre "vide", mais je comprends, à ma façon...
Merci Rémi.
Premièrement, bienvenue sur mon blog. Ensuite, je veux te dire que t'as pas idée à quel point tes paroles peuvent me toucher.
Non, c'est sûr que tu n'as pas vécu exactement ce même vide. Cela dit, ta compréhension est tout de même sincère et ça vient me chercher.
Ta douce et toi avez une belle puce dans votre vie. Je suis très fier et content pour vous. Profitez-en bien en masse, c'est un sapré beau cadeau que la vie vous a fait.
Merci encore...
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